Banking Act

Le BANKING ACT

La Grande Crise de 1929

Aux États-Unis, la crise boursière d’octobre 1929 déclenche l’inquiétude chez les déposants : ceux-ci craignent que leur compte bancaire -domicilié dans une banque de dépôt- puisse avoir subi de lourdes pertes à la suite de l’effondrement du marché des actions. Cette crainte n’est pas chimérique : beaucoup d’établissements se sont effectivement engagés dans des investissements à moyen ou long terme, et ont ainsi immobilisé leurs avoirs à longue échéance, dans des opérations devenues déficitaires en raison de la crise générale.

Une spirale dangereuse s’amorce : ne pouvant faire face aux demandes de retrait des déposants, les banques se retrouvent en situation de non-liquidité.

Situation d’autant plus contagieuse que l’industrie bancaire est très morcelée, donc fragile : parce qu’ils craignent la banqueroute, les déposants vident leurs comptes « runs » , acculent les banques à la faillite et finissent par causer une réaction en chaîne proprement dévastatrice.

Le « Glass-Steagall Act » est le nom sous lequel est généralement connu le « Banking Act de 1933 » aux États-Unis par lequel sont instaurés :
– l’incompatibilité entre les métiers de banque de dépôt et de banque d’investissement ;
– le système fédéral d’assurance des dépôts bancaires ;
– le plafonnement des taux d’intérêt sur les dépôts bancaires (Règlementation Q).

Il tient son nom d’un sénateur démocrate de Virginie, Carter Glass, ancien secrétaire au Trésor, et du représentant démocrate de l’Alabama, Henry B. Steagall, président de la commission Banque et Monnaie de la chambre des représentants.

Les marchés financiers connaissent un développement spectaculaire à la suite de :
– l’adoption du système des changes flottants en mars 1973 ;
– la suppression des commissions fixes sur les valeurs mobilières aux États-Unis le 1er mai 1975 ;
– forts mouvements de taux d’intérêt décidés en 1979 par la banque centrale américaine (FED) pour éradiquer l’inflation.

Ces évolutions fragilisent le Glass-Steagall Act et le privent de pertinence :
– Les banques commerciales, via certains artifices comptables et juridiques — surtout via la création de filiales à l’étranger, en particulier à Londres — participent pleinement à la croissance des marchés financiers ;
– Les banques d’investissement se trouvent, elles, de plus en plus sous-capitalisées ;
– Le tissu du système financier semble se fragiliser : il se délocalise et redonne vie à la City de Londres, dont il fait durablement la première place financière du monde.

La banque centrale américaine va tenter plusieurs fois d’assouplir le système à partir de 1986, mais ce n’est que devant le lobby réclamant la légalisation de la fusion géante entre City et Travellers que le Sénat américain se résoudra à abolir ce qui est présenté comme étant le « dernier vestige des années trente ».

Battu en brèche depuis le milieu des années 1970 et largement contourné par l’ensemble de la profession bancaire, il est finalement abrogé – sous l’administration Clinton, le 12 novembre 1999 – par le Financial Services Modernization Act, dit Gramm-Leach-Bliley Act, juste à temps pour permettre la fusion constitutive de Citigroup.

La crise financière de 2007-2010 remet sur le devant de la scène la question de la pertinence d’une séparation des fonctions bancaires :
En décembre 2009, les sénateurs John McCain (républicain/Arizona), Maria Cantwell (démocrate/ État de Washington), et l’ancien gouverneur de la Réserve fédérale Paul Volcker avancent l’idée d’un retour à la loi Glass-Steagall par le biais d’une remise en vigueur du texte de loi originel (Banking Act de 1933).

Le Dodd–Frank Wall Street Reform and Consumer Protection Act de juillet 2010 est partiellement inspiré de cette proposition.

En Europe, un nombre grandissant d’experts appellent également à l’adoption d’une législation bancaire stricte inspirée du Glass-Steagall Act. Cette approche régulationniste est préconisée notamment par la Commission Vickers au Royaume-Uni, ainsi que le World Pensions Council (WPC) et le CJD7 en Europe Continentale afin d’éviter les conflits d’intérêts potentiels et les risques de contagion systémique en cas de crise.

Ce point de vue se développe à la faveur de la « crise du Libor » : au cours de l’été 2012, les éditorialistes du Financial Times au Royaume-Uni, appellent désormais à l’adoption rapide d’un Glass Steagall II pan-européen.