Un système de Ponzi est un montage financier frauduleux qui consiste à rémunérer les investissements des clients essentiellement par les fonds procurés par les nouveaux entrants. Si l’escroquerie n’est pas découverte, elle apparaît au grand jour au moment où elle s’écroule, c’est-à-dire quand les sommes procurées par les nouveaux entrants ne suffisent plus à couvrir les rémunérations des clients1. Elle tient son nom de Charles Ponzi qui est devenu célèbre après avoir mis en place une opération basée sur ce principe à Boston dans les années 1920.
Imaginons que quelqu’un propose un investissement à 100 % d’intérêts : vous lui donnez 10 euros, il vous en rend 20 en utilisant l’argent déposé par les clients suivants (il lui suffit d’ailleurs de proposer un rendement double des rendements connus du marché pour s’attirer de la clientèle et pour durer). Le système est viable tant que la clientèle afflue, attirée en masse par les promesses financières (et d’autant plus tentantes que les premiers investisseurs sont satisfaits et font une formidable publicité au placement). Les premiers clients, trop heureux de ce placement mirifique, replacent leur argent eux aussi, s’ajoutant à tous ceux qu’ils ont réussi à convaincre.
Le phénomène fait alors boule de neige, entretenu tant que l’argent rentre et permet de payer à 100 % les nouveaux investisseurs. L’organisateur prend une commission, bien compréhensible lorsque l’on voit les promesses qu’il fait, et qu’il tient. Le système peut durer tant que la demande suit la croissance exponentielle imposée par ce système, les clients arrivant par 2, 4, 8, 16, 32, etc. Lorsque les nouveaux arrivants se font rares, la chaîne se coupe, la bulle éclate : tous les derniers investisseurs sont spoliés. Les gagnants sont ceux qui ont quitté le navire à temps.
L’homme d’affaires américain Bernard Madoff, président-fondateur d’une société d’investissements et très actif dans le NASD et le NASDAQ, a créé un système de Ponzi qui a fonctionné pendant 48 ans, de 1960 à la crise financière de 20084. C’était un gérant de hedge fund qui promettait des retours sur investissements relativement élevés, de l’ordre de 8 à 12 % par an. Ce qui sortait le plus de l’ordinaire avec les performances qu’affichaient ses fonds était l’absence de retours négatifs sur de très longues périodes et une volatilité (l’équivalent du risque de l’investissement) très faible. Autre indice alarmant, à la clôture de chaque exercice, Madoff déclarait être liquide, c’est-à-dire détenir tous ses avoirs en liquidités, et ainsi ne publia jamais de relevés indiquant la quelconque possession de titres financiers.
Enfin, les titres sur lesquels il disait investir, notamment des options sur indices, n’étaient pas assez liquides pour « absorber » les volumes qu’un fonds de la taille de celui de Madoff aurait engendrés. L’utilisation de modèles mathématiques financiers, des clients réputés, des postes élevés dans l’administration, l’assuraient d’un prestige important. Lorsque de nombreux clients souhaitèrent retirer leurs avoirs de sa société d’investissement lors de la crise financière de 2008, ils se rendirent compte que les caisses étaient vides et qu’ils avaient perdu tout leur argent.
Avant son arrestation, Bernard Madoff gérait officiellement 17 milliards de dollars.
ACTUALITES
La Chine découvre une énorme chaîne de Ponzi
¤ Une plate-forme de prêts entre particuliers provoque un scandale retentissant.
¤ Elle a fait 1 million de victimes et détourné 7,6 milliards de dollars.
Les recettes de Charles Ponzi (1882-1949) – rémunérer et attirer les nouveaux investisseurs avec l’argent collecté auprès d’autres clients – gardent une simplicité universelle et donc une popularité mondiale comme en témoigne le dernier scandale en Chine. Ezubao, une société de prêts entre particuliers (« P2P »), est accusée d’être une immense chaîne de Ponzi.
Vingt personnes ont été arrêtées et le montant détourné, 50 milliards de renminbis (7,6 milliards de dollars) est le plus élevé pour une arnaque financière visant des particuliers en Chine. Près de 900.000 d’entre eux se sont laissés attirer par les rendements attrayants, 15 % par an, promis par la société. En nombre de victimes, cette chaîne de Ponzi établit un record mondial mais en valeur c’est toujours Bernard Madoff et ses 65 milliards de dollars détournés qui reste en tête.
La performance promise aux particuliers chinois était bien supérieure à la rémunération des dépôts bancaires. Seulement, 95 % des projets à financer sur la plate-forme Ezubao n’existaient tout simplement pas. C’était une vitrine pour attirer les chalands. Déjà, en décembre dernier, des clients mécontents et inquiets avaient commencé à faire le siège de la société pour récupérer, en vain, leur argent. Celui-ci a été utilisé pour rémunérer d’autres investisseurs et financer les dépenses personnelles (résidence secondaire, diamant…) de Ding Ning, 34 ans, le fondateur d’Ezubao.
3.700 sites et plates-formes
La rapidité avec laquelle les sommes ont été dilapidées est exceptionnelle puisque la société financière opérait depuis moins de deux ans. Les enquêteurs devront déterminer si la société a bénéficié d’appuis et couverture politiques. D’autres mauvaises surprises et autres fraudes sont-elles à attendre ?
Il existe près de 3.700 sites et plates-formes en Chine qui proposent aux particuliers de prêter de l’argent pour financer les projets des autres. Un monde très peu régulé et dangereux. Les autorités redoutent qu’un tiers de ces sites connaissent des difficultés (fermetures, fraudes…) à l’avenir. En quête de placements rentables alors que la Bourse chinoise est durablement déprimée, les petits porteurs sont des cibles de choix pour les escrocs. Selon le magazine « Quartz », les fraudes financières et les arnaques ont coûté 24 milliards de dollars à la Chine en 2015.